Je ne sais plus vraiment quand ça a commencé, je ne sais pas non plus quand ça finira. Une chose est sûre, je sens que cela m'accompagnera longtemps, de façon plus ou moins prononcée, suivant le temps tout en suivant mon temps... Que dire pour premier mot ? Que dire de ce vaste univers tout aussi fascinant qu'étourdissant ? Du haut de mes quinze ans, je ne sais encore rien, mais j'ai pourtant le sentiment que, chaque fois que je regarde les images s'animer devant moi, une part du chemin que j'emprunte se précise peu à peu. Étrange sensation, joie immense, abîme presque effrayant, je me suis laissée couler au creux des bras de ce 7ème art aux mille facettes et, à ma grande surprise, je ne me suis pas perdue. Au contraire, j'ai trouvé ce qu'il manque peut-être à certains : le rêve éveillé, la liberté d'un instant, l'imaginaire éphémère qui s'embrase quand le noir se fait dans la salle... quand le film commence sa marche hypnotique !

Lorsque j'ouvre mon dictionnaire, à la page 422, je trouve ceci : « Cinéma n. m. Procédé permettant de donner l'illusion du mouvement par la projection sur un écran de vues successives enregistrées sur un film. ». Si je devais donner ma définition du cinéma, cela sonnerait plutôt comme suit : « Le cinéma, c'est comme un tic-tac menthe forte. Au début, c'est insignifiant, ça fond gentiment sur la langue mais, quand tu le croques, subitement, ça te saute littéralement à la figure, ça te tire même parfois les larmes et tu sais que là, tu ne vas plus pouvoir t'en passer ! ». Voilà je crois, l'esquisse de mon premier mot, prémisse qui se résume à peu de chose près à la pensée suivante : chacun découvre et appréhende le cinéma à sa façon, selon ses goûts, ses pensées et ce qu'il est ; en bref, le 7ème Art unit tout aussi bien qu'il désunit les visions de chacun.

Se demander quel est son film favori, son genre ou encore son réalisateur préférés relève pour ma part du défi. En effet, même si je regarde des films depuis mon enfance et qu'à chaque âge j'ai pu me donner des réponses, je réalise aujourd'hui qu'elles restent finalement en perpétuelle évolution. Bien entendu, certaines œuvres s'imposent au fil du temps mais elles ne suffisent pas tout à fait à me satisfaire car ma soif de découvrir me pousse à toujours compléter cette large et hétéroclite collection qui m'a constituée, me constitue et me constituera !

Tout ceci repose en partie sur le fait que, depuis toute petite, mes parents m'ont ouvert l'esprit aux univers artistiques, sonores et visuels. Le cinéma a bien entendu été l'une des plus importantes découvertes de ces temps juvéniles : j'ai grandi avec lui. Tout d'abord, c'était un fort agréable compagnon de jeu. Puis, il s'est peu à peu imposé à moi comme une « passion ». C'est d'ailleurs aux portes de l'adolescence, ce point étrange de mon existence, qu'il m'a enfin totalement conquise, faisait de moi une ''cinévore'' avérée, et avec lui, tous les médiums qui m'intriguaient se sont réunis, se croisant et se décroisant pour finalement former une toile qui m'est propre.

Tous ces éléments qui gravitent dans ma tête s'harmonisent donc en un tout constitué d'innombrables images. Cette large palette de films peut très bien compter des œuvres aussi dissemblables que La chevauchée fantastique ou Independence Day, toutes deux cependant découvertes fortuites et heureuses de mon enfance. Quels que soient le genre, la date, le réalisateur ou les acteurs d'un film, lorsque je m'assieds devant l'écran, je reste, chose primordiale, ouverte à toutes possibilités, chaque film à droit a sa chance, non ? Les films sont bien entendus agencés, classés, répertoriés, mais ils ne forment en réalité qu'un seul et unique tout qui est le Cinéma ! Et ce qui me fascine dans le 7ème Art, c'est son incessant renouveau. Un film, c'est avant tout pour moi une atmosphère, des images qui s'impriment dans l'esprit, des messages forts, et la démonstration pure et simple de l'imagination presque infinie de l'Homme, de son audace, de sa capacité à créer et raconter...

Voilà donc en peu de mots ma vision de ce gigantesque mont nommé Cinéma que je commence seulement à gravir. Je le perçois comme une immense fenêtre ouverte sur le monde mais parfois aussi, comme une sorte d'échappatoire ; peut-être même un jardin secret ? J'attends de ce cinéma qu'il continue à me faire rire ou pleurer car les émotions se bousculent à ses portes. Pour moi ce qui s'échappe des Bêtes du sud sauvage, de La Liste de Schindler, du Voleur de bicyclette, de Leviathan, de Ciel d'octobre, de Jeux Interdits ou encore de Contact, montre d'une part qu'il sait donner matière à dénoncer, faire espérer et réfléchir, et d'autre part même à faire rêver ou s'émouvoir ; choses à ne jamais négliger ! Il n'y a probablement aucun âge ou état d'esprit pour le découvrir, il suffit de s'y laisser happer, et ce moment précis où vous comprenez que vous l'aimez sincèrement est des plus crucial.

Jeanne Bouchot