Il s'agit d'une contraction du ''Kami no michi'', littéralement ''La voie des Kamis'' qui daterait selon les historiens de 628 après JC et dont les préceptes ont été constitués en 712 dans le ''Kojiki'' oeuvre d'un officier de l'Empereur Gemmaï nommé Ono-Yasuromo. Je laisse la datation au conditionnel car plusieurs origines sont répertoriées. Une autre base, le Nihongi, datant de 720 est une compilation des us et coutumes japonais de cette époque. D'autres recueils postérieurs, allant jusqu'en l'an 900, contiennent également de précieuses informations sur la constitution des sociétés de l'époque et donc de leurs rites et croyances.

      La genèse du monde dans le Shinto s'établit à partir de cinq divinités premières qui surgissent spontanément du chaos initial. Après différents accouplements mystérieux apparaissent Izanagi (celui qui invite) et sa sœur Izanami (Celle qui invite) qui vont découvrir la sexualité et s'accoupler charnellement pour créer, après diverses péripéties, les Kamis et les îles du Japon. Ces Kamis, dont le plus important est Amaterasu, le Soleil (à noter qu'il s'agit d'un Kami féminin), constituent le fondement de la croyance shintoïste. Ils sont représentés placés en haut d'un Panthéon des ancêtres, maîtres des ''Clans'' initiaux et devenus Dieux ou Déités de la nature. Il faut aussi savoir que l'Empereur du Japon est sensé être le descendant direct d'un Kami. Mais il n'existe pas pour autant un dogme shinto ou même un paradis spirituel. Le Shinto est une sorte de philosophie de vie (un peu comme le Bouddhisme) qui ne vise qu'à accorder l'homme avec son univers et lui apporter en cela une éternité spirituelle. Motoori, un des maîtres théologiens du Shinto disait : « Savoir qu'il n'y a pas de voie à suivre est connaître et suivre la voie des Dieux. » Il s'agit donc d'un vaste système de croyance, coutumes et pratiques sensé régler l'existence terrestre.

      En 538, lors de l'introduction du bouddhisme, les Devas (les esprits bouddhiques) seront identifiés comme des Kamis ce qui conduira à différentes synthèses des deux croyances pour aboutir à des avatars divers mêlant les Kamis aux Bodhisattvas - les sages en passe de devenir Bouddha - (le Tend et le Shinto tantrique) le plus souvent en fonction des versions choisies par les différents Shoguns. Le confucianisme, apparu plus tard, vers le XVème siècle conduira également à des amalgames (le Suiga Shinto), mais c'est le Shinto pur et dur qui redeviendra la religion officielle du Japon sous l'ère Meiji, de 1868 à 1912, les prêtres devenant alors fonctionnaires d'état.

      Depuis lors, 13 nouveaux cultes liés au shintoïsme ont été répertoriés, observés par des sectes mêlant différentes croyances, incorporant même le christianisme apparu au XIXème siècle.

      Mais pour en revenir aux principes du Shinto, si sa mythologie peut paraître à la fois naïve et complexe, comme d'ailleurs toutes les mythologies du monde, le rôle et l'importance philosophique et spirituelle des Kamis sont absolument fondamentaux dans la constitution de la société japonaise, ce depuis l'antiquité jusqu'à l'époque moderne. Il s'agit d'une force spirituelle agissant sur tous les aspects de la vie quotidienne d'un Japonais, de son éducation à sa vie amoureuse, sur ses mœurs et sur sa morale, sur ses orientations politiques et son statut social.

      Le Kami est en effet la déité absolue de tout l'environnement et de toutes les activités humaines. En premiers lieux, règnent les Kamis des éléments naturels comme le soleil (je l'ai dit plus haut) les astres en général, les saisons et aussi la pluie, le vent, la terre, le feu, ainsi que tout ce qui peut se rapporter à la vie paysanne, base de la société nipponne. Ces Kamis peuvent être bienfaisants mais aussi redoutables et causer d'irrémédiables dommages aux êtres humains (les tremblements de terre par exemple). Un autre type de Kami est lié aux comportements humains et aux différentes activités que ceux-ci exercent. Il existe autant de Kamis qu'il y a de professions ou d'occupations personnelles. Car le Kami est LE MODÈLE, la référence absolue de ce qu'il représente, l'esprit de la quintessence.

      Le Kami du Samouraï est le prototype du Samouraï idéal (Voir Yojimbo), infaillible aux devoirs de son statut, le Kami du fonctionnaire est le fonctionnaire absolu, qui sait de façon impeccable remplir son rôle de fonctionnaire (Allusion à Vivre).

      A titre de comparaison, on peut dire qu'il s'agit là d'un concept assez proche de celui inventé par les Indiens d'Amérique du nord, entre autres les Yaquis, dont Carlos Castaneda fit son fond de commerce dans les années 70. C'est la notion ''d'impeccabilité'', de l'âme et de l'action, l'unique manière de devenir et d'être pour un ''Homme'' libre.

Alain Jacques Bonnet